Plus rien à écouter
Plus rien à écouter. Pourtant, il reste des disques encore empaquetés. La playlist « Nouveautés » est pleine. Celle « Jamais écoutés » est humiliante. Mais rien ne va. Ce n'est pas non plus qu'il n'y ait rien de bon à écouter, rien qui plaise, que nos goûts aient changés. Plus de soixante morceaux à cinq étoiles sont là, prêts à nous sortir des pire déprimes – des airs de Keith Jarrett incroyables qui nous ont un soir manifesté la vérité, un passage de Messiaen réconciliateur incandescent, la berceuse d'Emily Haines ou la peau de Joanna Newsom – mais non.
Non, pas ce soir, pas là. Ce n'est pas cela que nous cherchons, ça n'est pas cela qui manque. Le bol d'air, le son juste – la musique qui ne fracasse pas, qui rentrera dans l'oreille de ce jour comme la douche à trente-sept degrés paraît comme une seconde chair à la chair. Quelque chose d'exact mais sans effort, prolongement naturel de l'état d'esprit, capable pourtant de nous tirer de la torpeur, et si c'était possible, de nous ouvrir un peu.
Le degré zéro de la musique, comme pour l'écriture, comme pour l'amitié, comme pour la bière aussi, sans style et sans manières, sans plus rien à retirer.
On soupire.